MUSIQUE ET REFLEXOLOGIE PLANTAIRE Une Étude Comparative
Introduction
Avant de découvrir la réflexologie et de m’en passionner, j’ai eu le grand plaisir d’enseigner la musique et plus précisément le piano à de jeunes élèves. Ces années d’enseignement m’ont permis de me mettre à l’écoute de mes élèves, discerner leur capacité ainsi que leurs difficultés afin d’en tirer un enseignement personnalisé.
Lors de mon premier niveau de réflexologie, dès mes premières chenilles et reptations du pouce pratiquées sous l’œil vigilant et protecteur de Véronique, j’ai compris que la musique entrait en symbiose avec la réflexologie. Les associations et points communs me mettaient en joie, j’avais trouvé une passerelle que je pouvais franchir d’un coté comme de l’autre.
A travers cette étude, je vais tenter de vous faire partager mes réflexions. La dernière partie s’orientera vers l’analyse d’un concerto écrit par Vivaldi, en rapport direct avec un des 5 éléments, base de la médecine traditionnelle chinoise.
La technique au service du patient
Le nom des notes est la base de la pratique de la musique. Rares sont les musiciens qui jouent à la perfection dans l’ignorance de celles-ci. En réflexologie, la connaissance et la localisation des zones réflexes sont indispensables à une bonne pratique réflexologique. Il en va de même pour les points spéciaux, points de méridiens et points de cheville en réflexologie orientale.
Chaque pièce musicale comporte un rythme et suit une cadence. Les figures de notes représentent des durées (noire, ronde, croche). Il est donc mathématiquement indispensable de respecter une régularité du tempo, en jouant un nombre identique de temps par mesure.
En réflexologie, une chenille effectuée doit être régulière soit dans la rapidité, ou dans la lenteur, selon le choix du praticien. Son appui ou ses chenilles pourront être superficielles et rapides pour amener un maximum de Yang, superficielles et lentes pour ajouter du Yin, lentes et profondes pour ramener un maximum de Yin et profondes et rapides pour ajouter du Yang. La qualité du tissu sera l’indicateur pour le réflexologue (notion de Yin et de Yang).
Le phrasé est une liaison des notes entre elles, comme si ces notes, jouées par un instrument, voulaient nous raconter une histoire, nous lire un poème de façon fluide : c’est ce que l’on appelle la liaison dans le jargon musical. En réflexologie, l’enchainement des chenilles ainsi que des mouvements dans le déroulement d’un protocole sont primordiaux afin de garder un contact avec le patient et ne pas rompre ce moment privilégié d’interconnexion entre les cellules du patient et celles du praticien. Une main retirée trop rapidement risque de déranger, d’inquiéter le patient et le faire sortir brusquement d’un moment de relaxation ou de travail en profondeur.
Les accords sont des notes qui, lorsqu’elles sont jouées ensemble, procurent une harmonie. Ces notes peuvent être jouées l’une après l’autre, ce sera l’arpège, ou bien jouées en même temps, c'est-à-dire plaquées.
En réflexologie, l’accord parfait pourra être atteint par le réflexologue. Lorsque celui-ci aborde une problématique ou fait face à un disfonctionnement d’un ou plusieurs systèmes, il choisira une approche harmonieuse, c'est-à-dire globale. Il pratiquera des chenilles sur des zones reflexes, puis viendra travailler des points spéciaux qui auraient un lien avec ces mêmes zones reflexes, des pressions ou des moxas sur des points de méridiens.
Dans sa démarche, il pourra également prodiguer des conseils diététiques, et d’hygiènes de vie. Il cherchera à rétablir l’homéostasie du corps.
En musique, une même note peut se retrouver à plusieurs endroits sur un clavier, ou une guitare, selon qu’elle sera aigüe ou grave. Il s’agit d’octaves. En réflexologie, cette notion d’octave pourrait avoir tout son sens lorsque nous abordons les zones réflexes vues par la réflexologie occidentale et la réflexologie orientale (tête au niveau du talon et tête au niveau de l’orteil). De plus, une même zone reflexe pourra être travaillée à différent niveau du pied ou sur la jambe.
L’interprétation d’une œuvre sera jugée de qualité si le jeu, la mise en place des pianissimo, piano, mezzo piano, mezzo forte, forte, et fortissimo, crescendo et decrescendo est émouvante. Ce sont, en finalité, les variations musicales qui apporteront du relief et de l’émotion au mélomane lors de l’écoute d’une œuvre.
En réflexologie, nous cherchons à atteindre cet objectif lorsque nous travaillons en conscience à partir d’un des 5 éléments.
Imaginons-nous en séance avec un patient. Notre objectif serait d’utiliser l’élément « Bois ». Nous pourrions choisir de faire des mouvements amples et caressants pour décrire le vent, et faire baisser le rythme cardiaque du patient. Par opposition, nous pourrions effectuer des accélérations dans notre gestuel pour exprimer la colère et par la même occasion, ramener à lui le patient qui s’est endormi.
Le reflexologue aura donc tout le loisir de suggérer, d’imposer sa vision personnelle, son interprétation, et sa compréhension de l’élément Bois ainsi que des 4 autres éléments. Dans les deux disciplines, on pourra donc parler d’improvisation : le réflexologue ainsi que le musicien, forts de connaissances et d’expériences solides, réaliseront des soins, non pas dissonants, mais au contraire, harmonieux et cohérents.
De plus, nous pourrions comparer la portée musicale avec le dessous du pied en réflexologie orientale. Ainsi, tous au long des 9 lignes horizontales qui traversent le pied de haut en bas, je place mes points spéciaux tels des notes de musique.
Les silences et les pauses en musique pourraient correspondre en réflexologie avec la posée des mains sur les chevilles en début et fin de séance.
Une même finalité : l’apaisement et le soin
Aujourd’hui, le monde scientifique a établi un rapport étroit entre l’action des modulations sonores et notre système métabolique. Ces modulations pourraient soigner toutes sortes de maux physiques et psychologiques. Ces notions sont décrites dans le Tao de la Voix (Chun-Tao-Cheng, 1999).
La musique apaise nos angoisses, favorise la concentration, stimule la mémoire, facilite l’apprentissage du langage ... « On sait depuis longtemps que la musique adoucit les mœurs » (Pigani).
En Floride, une demi-heure de musique classique par jour est obligatoire (Beethoven’s Babies Bill) loi 660. Elle vise à stimuler de façon harmonieuse le développement cérébral des enfants.
En France, l’action bénéfique de la musique n’est pas totalement inconnue. Dans les hôpitaux parisiens Trousseau et Necker, les salles de pré-anesthésie infantile deviennent de véritables salles de concert. Enfants, parents et personnel soignant peuvent y manipuler des instruments, découvrir des sons, improviser ou écouter des CD. Les résultats montrent que la musique joue un rôle positif sur la réussite des anesthésies et aide les enfants à mieux vivre le traumatisme de leur hospitalisation.
4 siècles avant JC, Platon écrivait déjà dans son livre « La République » : « la musique est un moyen plus puissant que tout autre parce que le rythme et l’harmonie ont leur siège dans l’âme. Elle enrichit cette dernière, lui confère la grâce et l’illumine. » (Platon, 1833).
En réalité, notre organisme est un véritable orchestre à lui seul : battements du cœur, rythme cérébral, respiration des poumons, vitesse de circulation du sang, vibration des cellules, et pulsation du système nerveux. Si les rythmes et les fréquences extérieurs sont trop rapides, ou trop agressifs, les interprètes de notre orchestre intérieur sont perturbés. Ils essaient alors de s’adapter en suivant le mouvement. En conséquence, le stress et la tension montent. A l’inverse, si la musique entre en correspondance avec nos rythmes biologiques, l’harmonie règne.
En partant de ce principe, le chercheur français Fabien Maman, de l’académie Tama-Do (la voie de l’âme en Japonais) à Londres, a fait sa propre synthèse de l’univers vibratoire (sons, couleurs, odeurs, mouvements) et a mis au point une technique très originale : pour soigner, il pose des diapasons (petites fourches qui servent à accorder les instruments) directement sur les points d’acupuncture. Les vibrations courent le long des muscles, nerfs, et os et ”raccordent “ notre corps et nos énergies.
Certaines fréquences musicales entrent en résonance avec celles de notre système nerveux et procurent une sensation d’apaisement, et de bien-être. Ce phénomène physique explique aussi l’effet calmant des musiques dites de relaxation.
Ces musiques s’harmonisent à la perfection avec une réflexologie plantaire dont l’un des buts est d’amener le patient à une relaxation profonde à certains moments du soin. Les différents types musicaux cités ci-après agissent de façons différentes sur le corps :
• Le chant grégorien aide à la concentration et à la méditation, et va atténuer le stress.
• Le jazz et le blues ont un impact plus tonifiant sur l’organisme.
• Le rock relâche les tensions intérieures.
• La techno perturbe très gravement, selon les spécialistes de la MTC, le Qi ancestral, c’est à dire l’énergie qui nous relie à nos vies antérieures et futures.
• La musique Sacrée est propice à la relaxation, et à la réduction des douleurs.
C’est l’art de la musique thérapeutique. Il y a 5000 ans, le “Hong Fan”, traité chinois, expliquait le lien entre les notes et les viscères, et comment ces notes produisent des impressions profondes, changent les usages et transforment les mœurs. En occident, la musicothérapie s’intéresse à cette problématique.
Afin d’atteindre l’apaisement lors d’une séance de travail, Le réflexologue va chercher à harmoniser les fonctions vitales, pour libérer le stress et les tensions nerveuses. Il soulagera les tensions du dos et autres douleurs. Par son action, il améliorera la circulation sanguine, apportera détente et relaxation profonde, activera le système lymphatique. .Les toxines seront éliminées.
L’accueil du patient, son installation, et l’écoute bienveillante du réflexologue contribuent à poser les bases d’une séance de qualité qui sera bénéfique pour le patient.
La préparation physique et psychique du praticien, grâce à la pratique quotidienne du Qi Gong, permettra au praticien, tel un musicien avant de jouer une partition, de se recentrer sur ses énergies vitales, et trouver son équilibre.
L’été, concerto extrait des 4 saisons de Vivaldi
Vers 1720 vivait à Venise un prêtre-musicien, à la fois violoniste virtuose, compositeur et impresario, qu’on surnommait Il Prete Rosso, «Le Prêtre Roux», et que ses crises d'asthme empêchaient de dire la messe: c'était Antonio VIVALDI.
La musique du Prêtre Roux est véritablement vénitienne par sa fantaisie, son charme, son sens du rythme et des couleurs. Grand virtuose du violon, Vivaldi était très apprécié en Italie, comme violoniste.
Les Quatre Saisons sont l'œuvre la plus célèbre d'Antonio Vivaldi, unanimement appréciée. Pour le grand public, un concerto comme Le Printemps est facilement abordable par ses carrures franches, ses motifs mélodiques simples et chantants, et sa rythmique incisive. Enfin, par son caractère descriptif, cette musique fait volontiers appel à l'imagination.
Le concerto pour soliste et orchestre est une forme assez courante où un instrument unique s'oppose à l'orchestre dans une forme en 3 mouvements : Vif-Lent-Vif.
Les Quatre Saisons se composent de 4 concertos pour violon et orchestre, peignant chacun une saison et se divisant en trois mouvements: Allegro - Adagio (ou Largo) - Allegro (ou Presto). La forme des mouvements est toujours similaire : une alternance libre de refrains et de couplets pour les deux mouvements extrêmes, et une coupe binaire ou en un seul volet pour le mouvement central.
Un de ces quatre concertos est L'Eté (Vivaldi, 1723). Il s’agit d’un chef-d’œuvre de suggestion musicale, «impressionniste» avant l’heure. Vivaldi y décrit musicalement une scène que l’on imagine en été, L'homme et ses bêtes y souffrent de la chaleur; les oiseaux chantent pourtant. C'est en vain que le paysan cherche le sommeil, car le tonnerre se fait entendre dans le lointain et des insectes le harcèlent. Un orage terrible s'abat alors, détruisant les récoltes. Dans ce concerto, la musique se fait à chaque instant complice du texte, tout en dépassant les effets poétiques par la portée symphonique de l'écriture musicale. Ce concerto est vibrant de sensualité d'hédonisme. Il nous inspire des vertiges et des glissements vers le plaisir de la virtuosité.
Vivaldi s’est inspiré soit de tableaux de maitres décrivant des paysages, soit de poèmes pour composer sa musique.
L'été
Pendant cette ardente saison, où flamboie le soleil
L'homme languit, ainsi que les troupeaux, et les pins sont brûlants.
Le coucou retrouve sa voix. Des le matin,
La tourterelle roucoule et le chardonneret chante.
Le Zéphyr souffle doucement, mais tout à coup,
Borée cherche querelle à son voisin;
Le berger déplore son destin,
Et craint le violent orage qui menace.
La peur des éclairs et du tonnerre
Prive de repos ses membres fatigués.
Et des essaims furieux de mouches et de moucherons le harcèlent.
Hélas! Ses craintes ne sont que trop fondées.
Le ciel tonne et fulmine, la grêle
Brise la tête des épis et abat les graines
Dans la théorie des 5 éléments ou des 5 mouvements, un des fondements de la médecine chinoise, nous retrouvons les 5 potentialités inhérentes à tout phénomène, 5 phases d’un cycle, 5 processus fondamentaux en mouvement et en connexion permanente. Les 5 éléments associés à une saison sont représentés par les 5 symboles suivants : Le Bois, le Feu, la Terre, le Métal, et l’eau.
Chaque élément correspond à une énergie particulière qui dynamise spécifiquement les organes et les fonctions métaboliques en correspondance. L’élément est, entre autres, nourri et dynamisé par les qualités de la saison (froid, chaleur, humidité).
L’idée de comparer l’été, traité en musique par Vivaldi, et l’été dans la théorie des 5 éléments m’est irrésistible.
L’élément feu est associé à l’été, et à la chaleur. Il représente le mouvement ascendant. Il est aussi associé à la croissance. Positionner au Sud, et à midi, il représente les forces vitales en action, la construction, la chaleur interne (force naturelle Yang) qui permet le fonctionnement organique et maintient la vie. Il est signe de joie, et d’amour.
L’eau viendra très vite détruire le feu par l’action de l’orage et de la pluie.
Le reflexologue pourra jouer sur les accélérations et crescendo pour faire des reptations rapides et superficielles ou profondes.
Conclusion
Enseigner la musique c’est transmettre sa passion, ses connaissances, son expérience, donner de soi pour faire naitre une étincelle dans les yeux de l’élève. C’est aimer transmettre.
En réflexologie, le but sera similaire. Il s’agit de mettre à disposition du patient l’ensemble de son savoir orchestré avec méthode et réflexion afin que le patient se sente en confiance dans un premier temps et qu’il soit soulagé de ses maux.
La musique et la réflexologie, sont deux disciplines en interconnexion. Elles poursuivent le même but, montrer le chemin vers la guérison, accompagner vers le bien-être et l’épanouissement de l’être humain.
Pour terminer je ne manquerai pas de citer ces proverbes que j’aime beaucoup :
- Lorsque l’on touche les pieds, on touche l’âme : proverbe Chinois
-‘Là où se trouvent tes pieds commence le voyage’ (Tseu, 4e siecle avant JC (traduction française par Antoine Cathalau 2011))
Par Sylvie Lomenech
Praticienne en Réflexologie Plantaire
Promotion 2017
Travaux cités
Chun-Tao-Cheng, S. (1999). Le Tao de la voix. Pocket.
Pigani, E. (s.d.). La musique et le bien-être expliqués par la science. Consulté le Juin 25, 2017, sur www.musique-bienetre.fr : www.musique-bienetre.fr/actualites/la-musique-et-le-bien-etre-explique-par-la-science/
Platon. (1833). La république.
Tseu, L. (4e siecle avant JC (traduction française par Antoine Cathalau 2011)). Tao Te King - Le livre de la voie et de la vertu. Suki Editions.
Vivaldi. (1723). L'été - extrait des quatres saisons. Récupéré sur Youtube: https://www.youtube.com/watch?v=3veVvpyrlsI